vendredi 20 décembre 2013

CARTE BLANCHE A L'ETOILE NOIRE (6): LE CENTRE DE MON MONDE

Suite de la carte blanche à l'Etoile Noire, où se dévoile un lien mythique à Mostar et bien au delà: le centre culturel Abrasevic, qui fête présentement les dix ans de sa réouverture. Entre centre socioculturel et club alternatif, cette ancienne et vénérable maison de la culture s'est reconstruite autour d'un projet citoyen, culturellement, politiquement et socialement concerné. Yougosonic en profite pour saluer chaleureusement l'équipe d'Abrasevic pour son action. Respect et longue vie, un autre Mostar est possible!

Pendant vraiment très longtemps j’ai évité d’emprunter Šantićeva. De jour comme de nuit. Puis, j’ai réussi à la parcourir de jour. Une nuit, en rentrant à la maison de Cernica, je suis arrivée à l’angle de Šantićeva et je me suis arrêtée. J’ai considéré un moment la longueur de mon détour pour l’éviter. Traverser Carinski Most, braver les courants d’air humides de Carina, Musala, Fejčeva, retraverser la Neretva à Bunur et arriver à la maison dans 40 minutes ou alors affronter Šantićeva seule à 2h du matin mais arriver dans 8 minutes. La rakija de la soirée m’a largement aidée à m’enhardir. J’étais terrifiée, j’avais peur des ruines et peur des chiens. Mais surtout des ruines. Šantićeva ressemblait à un immense château de sable mal tassé. 

samedi 14 décembre 2013

YOUGOKINO : REPETITOR A PRISHTINA, POUR QUE L'HISTOIRE NE SE REPETE PAS ?

Un petit Yougokino ? Ca faisait longtemps, le mot est faible, que le blog ne vous avait pas offert un petit film. 
Avant de retrouver la suite de notre carte blanche en cours de semaine prochaine, je vous propose un intéressant docu (in english) d'une vingtaine de minutes, pêché hier sur Facebook,  relatant la tournée du groupe serbe Repetitor au Kosovo en 2011.

Je le partage d'abord parce que Repetitor est un p... de bon groupe (les "Sonic Youth de Belgrade", pour faire court). Ensuite parce que des musiciens Serbes dans un Kosovo désormais indépendant et majoritairement albanais, forcément ça interpelle. Les Repetitor possèdent cet attrait pour les terras incognitas (contrairement à nombreuses idées reçues, de nombreux Serbes n'ont jamais mis les pieds au Kosovo), et probablement un léger goût du "fruit défendu", inclinations qui suffisent à les rendre d'emblée sympathiques. Leur excitation, mêlée de curiosité sincère, est palpable tout au long de leur road-trip entre les enclaves serbes (Gracanica, au début, et Leposavic à la fin) et Prishtina

samedi 30 novembre 2013

AU NOM DU NON

Demain dimanche a lieu en Croatie ce que les progressistes locaux appellent "le référendum de la honte": les talibans cathos du mouvement "u ime obitelji" ("Au nom de la famille") sont parvenus à obtenir qu'un référendum soit organisé - au frais du contribuable croate (!), déjà précarisé par des années de "transition" - pour demander à la population si elle est "ZA" (pour) ou "PROTIV" (contre), que la constitution croate stipule que "le mariage est l'union d'un homme et d'une femme", et UNIQUEMENT cela. Sous entendu, "mariage pour tous" à la croate, pas question !

dimanche 10 novembre 2013

CARTE BLANCHE A L'ETOILE NOIRE (5) : MOSTAR PERDU, MOSTAR RETROUVE

Suite de la Carte Blanche à l'Etoile Noire, ce parcours à la fois géographique et mental dans Mostar qui ponctue notre blog depuis plus d'un an. Hasard du calendrier, nous publions ce nouvel épisode vingt ans et un jour après la destruction du célèbre pont par les milices nationalistes croates du HVO. Un acte suscitant la stupeur générale en Europe et dans le monde.
De cette destruction, il n'est point question ici. Le pont est certes un symbole fort mais comme tout symbole fort, il tend à dissimuler par sa puissance d'autres traces, indices, signes ou faits, que cette carte blanche s'est toujours efforcée de dépister, hors des clichés et des sentiers (re)battus.
Ce post revient sur différentes "mémoires" de la ville, tantôt enfuies, à l'abandon, méprisées et souillées, tantôt miraculeusement renaissantes.  Bonne lecture!



dimanche 15 septembre 2013

BORGHESIA ET LE ZEITGEIST

L'évènement de la fin d'été, dans les recoins underground de la Yougosphère, c'est la parution d'une compilation hommage au groupe Borghesia, à l'initiative du webzine serbe Dark Scene et du label croate Room Tracks, avec des reprises de la plupart de leurs morceaux phares par des groupes d'ex-Yougoslavie et d'ailleurs.

Pour celles et ceux qui n'étaient pas encore de ce monde au milieu des années 80, ou qui se réalisaient à cette époque plutôt en butant du grossier pixel sur "space invaders", ou préféraient Jean-Pierre Mader et autres "démons de minuit", Borghesia est un duo slovène rattaché à la mouvance "électro-industrielle", appelée parfois aussi EBM (pour "Electronic body music"), genre à la mode dans les confins alternatifs de la musique en ces temps reculés où votre serviteur tentait de gérer son acné et les troubles existentiels de l'adolescence. 

lundi 5 août 2013

TRAVAUX D'ETE...

 

Ce blog va subir quelques mises à jour, rafraîchissements et réparations. La colonne à droite n'a plus été entretenue de longue date et nécessite quelque dépoussiérage, que je viens présentement de démarrer. Certains liens vers des vidéos youtube ne sont plus actifs, ce qui nuit à la lecture des posts concernés, privés d'une partie de leurs illustrations musicales. Dans la mesure du possible, je vais donc tâcher de les remplacer et je tâcherais également de remplacer ou supprimer certains liens hypertextes qui ne seraient plus actifs. Je remercie d'ors et déjà celles et ceux qui m'ont signalé quelques liens "morts" par mail. Sachant qu'il y a 54 posts publiés, je ne garantie pas un résultat à 100% mais "on fera au mieux", la priorité étant surtout que les illustrations vidéo soient à nouveau présentes.

Durant cette période, il est possible que le blog subisse quelques légères et temporaires perturbations. Je m'excuse par avance pour la gêne occasionnée.
La fin des travaux sera signalée par un nouveau post.

Merci de votre patience et de votre fidélité. A très vite pour de nouvelles aventures et très bel été à toutes et à tous !

jeudi 25 juillet 2013

NOS ANCETRES LES EFFACES

C'est un fait relativement méconnu du grand public, mais au moment de l'indépendance de la Slovénie, plusieurs milliers (1) de citoyens habitant le pays, parfois depuis plusieurs décennies, ont été "izbrisani"/"effacés" des registres officiels et donc privés de leurs droits civiques. Ils sont devenus des sans-papiers, voire des apatrides. Leur tort, être d'origine serbe, croate, bosniaque, macédonienne, monténégrine, etc., dans un nouvel Etat où l'ancienne patrie unitaire et sa devise de "fraternité et unité" n'avaient plus cours. La question des "effacés", moins spectaculaire que la purification ethnique orchestrée à coup de kalashnikov, viols et tortures, a aussi généré son cortège de drames humains et de douleurs. 

mercredi 3 juillet 2013

BOSNIAN RESET

La Bosnie-Herzégovine manifeste depuis près d'un mois, quasi sans faiblir, à la grande surprise générale. Le JMBG (Pour "Jedinstveni Maticni Broj Gradjana"/n° d'identification personnel civil, équivalent de notre numéro de sécu), ou plus exactement, l'impossibilité de sa délivrance pour cause de querelles politiques, a été le catalyseur du mécontentement d'une population, lassée d'être "l'otage" de ses dirigeants adeptes du "diviser pour mieux régner" sur un pays en stand-by permanent. On ne reviendra pas sur les faits : ceux qui ont besoin d'installer une mise à jour de leur actualité balkanique iront chez notre frère d'arme en blogging Guillaume Tesson, qui livre dans son "Next Stop Sarajevo" une excellente synthèse à plusieurs voix de la situation. C'est l'une des couvertures les plus pertinentes sur ce qui se passe que j'ai pu trouver dans le web francophone à ce jour. Les médias frenchies, hormis le Courrier des Balkans et BH Info, dont c'est le job, et quelques rares autres exceptions, sont littéralement passés à côté de l'événement, avant de se réveiller, il y a peu, en nous  jetant les bébés avec l'eau du bain, confondant la goutte qui a fait déborder le vase avec l'eau qui tournait au vert glauque dans le vase depuis un certain nombre d'années.

dimanche 2 juin 2013

ANTIFASCISME EN FREE DOWNLOAD

En ces temps troublés, entre le pavé stambouliote où des milliers de manifestants se battent pour sauver leur cadre de vie de la spéculation, au pavé parisien où des milliers de manifestants se sont battus pour "limiter" le cadre de vie d'une partie de leurs compatriotes homosexuels (cherchez l'erreur), en passant par Prijedor où les vivants de la "mauvaise ethnie" sont priés de ne pas honorer leurs morts victimes de la purification ethnique, il est intéressant de relayer l'initiative qui a vu la mouvance "antifa" (=antifasciste) d'ex-Yougoslavie, et différents groupes de ce territoire éditer la compilation "Zajednicka borba" (prononcer "Zayédnitchka borba"). Ce "combat commun" qui donne son nom à la compilation, c'est le combat contre le fascisme qui domine aujourd'hui les sociétés post-yougoslaves, et que ce blog dénonce régulièrement. 

vendredi 26 avril 2013

CARTE BLANCHE A L'ETOILE NOIRE (4) : ENSEMBLE VIDE (2/2)


Nouvel épisode de notre feuilleton en forme de carte blanche. En suite directe de la récente ballade dans le quartier de Podhum, hanté par ses ombres et ses non-dits, l'Etoile Noire nous entraîne aujourd'hui sur les pelouses du stade de Velež. Au football, comme dans les autres domaines de la vie courante en Bosnie-Herzégovine, il faut choisir son camp. Bon match !

Du rouge. Du rouge, du rouge, du rouge, du rouge. Du rouge sur les murs, du rouge dans le ciel aussi. J’habite du côté rouge de la ville, ça me revient chaque fois que je passe devant le bar des Ultras au bout de la grande rue de Podhum (1). Il y a toujours, assis à la micro terrasse, deux ou trois types qui ne savent pas sourire. Ils sont là, au croisement, comme des guetteurs. Ils n’aiment pas mes amis et bêtement je pense que j’aurais du mal à aimer les leurs.

Je déteste le football et bien plus encore, j’ai peur des stades. Comment en effet, ne pas remarquer qu’avec une affolante régularité, les conflits commencent dans les stades qui, invariablement se transforment ensuite en prisons, puis en lieux d’exécution. Je ne peux pas entendre le mot « stade » sans penser à l’agonie de Victor Jara dans celui de Santiago.
Aujourd’hui, c’est le Gradski Derby de Mostar. Velež contre Zrinjski, les blancs contre les rouges, les Ultras contre Red Army, la police spéciale contre Mostar, le chagrin contre l’impunité.


dimanche 14 avril 2013

PRESSE, PRESSION, REPRESSION...LE CAS DOMAGOJ MARGETIC

Depuis 35 jours à l'heure où j'écris ces lignes, le journaliste d'investigation croate Domagoj Margetić (prononcer Domagoï Marguétitch) est en grève de la faim à Zagreb, dans l'indifférence générale des médias occidentaux, pour qui il semblerait que seuls quelque agitation à la frontière kosovare ou les concerts d'un célèbre musicien originaire de Sarajevo plagiant le répertoire tzigane méritent un papier...

Margetić entend protester contre la difficile situation des journalistes en Croatie, qui, s'ils ne montrent pas patte blanche et n'écrivent pas des articles consensuels, sont volontiers exclus des médias, quand ils ne sont pas intimidés plus violemment. Lui même a reçu récemment des menaces de mort.

vendredi 29 mars 2013

CYRILLE ET METHODE EN TERRAIN MINE

Panneau indicateur à l'époque yougoslave
C'est l'une des infos de ce début d'année dans la Yougosphère, Vukovar serait sur le point de voir réapparaître l'alphabet cyrillique dans ses rues, en vertu d'une loi de l'Etat croate sur les minorités, que le gouvernement, soucieux de faire bonne figure à quelques mois de l'entrée dans l'UE, s'apprête à faire passer. En l'occurrence, dans chaque commune où les Serbes, ou toute autre minorité (1), pèse plus de 30% de la population, obligation sera faite que la "langue" de la minorité en question soit officiellement présente dans l'espace publique : panneaux indicateurs, institutions, etc.

lundi 11 mars 2013

LA FEMME YOUGO ENTRE TITO ET TURBO

Affiche Yougoslave pour le 8 mars.
C'était récemment la "Journée internationale de la femme" et j'adore ce genre de "journées" où l'on se donne bonne conscience avec des causes, en général louables, dont on se lave les mains les autres jours...Grands seigneurs, les messieurs auront été gentils en ce jour, ils auront fait la vaisselle, et vraisemblablement enrichi le secteur du commerce de fleurs coupées, où les femmes afghanes et nos femmes battues ne figurent pas en tête de gondoles, avant de reprendre le lendemain les bonnes habitudes du sexisme ordinaire...

Ce point de vue cynique et ironique se marie assez bien avec l'hypocrisie de la société socialiste autogestionnaire de la Yougoslavie titiste, où, officiellement, l'égalité homme-femme était l'une des valeurs dominantes. 
En réalité, dans la très patriarcale et machiste Yougoslavie, le 8 mars consistait en gros pour les hommes à offrir des fleurs à leur femme ou à leurs collègues féminines, quand ce n'était pas des casseroles ou des fers à repasser...et le lendemain, tout redevenait comme avant. 

vendredi 1 mars 2013

SI LA CULTURE COÛTE CHER ESSAYEZ L'IGNORANCE (1)

Photo (c) Midhat Poturović - Radio Slobodna Evropa


On a déjà évoqué maintes fois par ici la situation des musées de Sarajevo qui ferment les uns après les autres, faute de moyens, mais aussi (et peut être surtout) en raison de l'incompétence de leurs dirigeants issus de la particratie bosnienne... 


Yougosonic s'associe à son niveau à la campagne de sensibilisation organisée du 1er au 4 mars par la plateforme "Culture Shutdown". Elle consiste pour les musées participants à barrer une oeuvre d'un scotch fourni par l'organisation, à l'instar des musées fermés de Sarajevo, barrés par des planches ou des banderoles. 


Tous les détails de l'opé dans le lien (en anglais) ici.

Le blog reviendra sur cette situation tragique pour la vie culturelle bosnienne dans un post à paraître sous peu.

samedi 9 février 2013

CARTE BLANCHE A L'ETOILE NOIRE (3) : "ENSEMBLE VIDE" (1/2)

Suite de notre Carte blanche à l'Etoile Noire, cette ballade à la fois intuitive, subjective et complice dans Mostar, centre de l'Herzégovine qui se dévoile au fil des épisodes. Pour celles et ceux qui prennent le train en marche, les n°1 et 2 sont ici et

C’est de Lučki Most que la vue sur le Vieux Pont est la plus saisissante, mais personne ne vient jamais le regarder d’ici. C’est de Lučki Most qu’on observe le mieux la façon presque naturelle dont Stari Most s’insère dans ce canyon de la Neretva, à l’endroit précis où il est le plus étroit. J’aime m’arrêter à la gargotte qui fait l’angle du pont et de Titova. Au fond trône le portrait d’Alija en chef de guerre, coiffé de son béret. La terrasse est bordée par de magnifiques rosiers qui survivent mystérieusement au bord de la circulation incessante des voitures.


Stari Most vu de Lucki Most
(c) Crna Zvijezda


Lučki Most mène à Donja Mahala, petit quartier, comme un appendice, coincé entre Hum et la Neretva, s’étirant de Stari Most au pont Hasan Brkić.
C’est un quartier que j’ai toujours trouvé étrange. Un quartier ni mort ni vivant, un quartier où l’on se sent ni le bienvenu ni rejeté, un quartier où personne ne te parle mais où tout le monde veut savoir d’où tu viens, ce que tu fais et surtout pourquoi tu es là.

jeudi 10 janvier 2013

VOEUX A LA NATION, BILAN D'ETAPE ET POUR EN FINIR AVEC LA FIN DU MONDE

Yougosonic souhaite à ses lectrices et lecteurs une belle et heureuse année 2013 : santé, bonheur, réussite, amour, amitié, fraternité et unité...et tout ce que vous jugerez bon d'ajouter.



Les voeux de la télévision de Zagreb en 1969 (année de naissance de votre serviteur).
Délicieuse kitscherie d'un temps plus insouciant que le nôtre.

Je sais que je suis un rien en retard, et que du coup, les voeux de la maison nous situent à deux pas du Nouvel An orthodoxe. Aucun prosélytisme cependant chez le mécréant que je suis, juste une fin d'année coincée au niveau du dos ne favorisant pas la position assise du nerd devant son écran, un bref coup de spleen de retour à l'apnée hivernale après un mois et demi livré aux marchands du temple, suivis d'une reprise du "kuca-pos'o" (le métro-boulot-dodo" des Yougos) en flux tendu comme Vukovar en passe réintroduire le cyrillique.